Vol 85 – N° 1 – janvier 2020
Un désir d’objectivation : constitution du savoir psychiatrique contemporain
The desire for objectification: What constitutes contemporary psychiatric knowledge?
Page :5-11
Benjamin Weil
Résumé |
Objectifs |
Dire quelque chose du savoir du psychiatre contemporain et faire la part des différentes causes qui sous-tendent sa constitution.
Méthode |
L’observation critique de l’organisation de la recherche et de la pratique clinique des équipes de psychiatrie.
Résultats |
Désorienté, le psychiatre clinicien, voit sa discipline vaciller sur ses bases théoriques. La psychanalyse qui occupait largement le terrain conceptuel est aujourd’hui, presque partout, écartée du cœur du débat scientifique. Seulement, elle emmène avec elle tout ce qui s’est élaboré au sujet des savoirs intuitifs et laisse une discipline mécanisée, ne maîtrisant rien de ce qui l’influence et ne sachant plus quoi faire du sujet qui se présente à elle. À la place de ce savoir sur l’intersubjectivité, s’est installé un savoir discret, conforme au savoir économique, modifiant la nature même du discours clinique du psychiatre.
Discussion |
Cette transformation semble être facilitée par un désir d’objectivation du psychiatre, qui espère pouvoir tout à la fois répondre aux exigences de la commande politique et donner des gages de respectabilité scientifique.
Conclusions |
La psychiatrie semble n’être pas en mesure de faire confiance à sa spécificité si excitante : le travail reposant sur des savoirs intuitifs, dont la défense semble devoir se mener en partie dans le champ politique et nécessiter un replacement de la question éthique de la périphérie au cœur même de la constitution du savoir psychiatrique.
Mots clés : Épistémologie, Psychanalyse, Psychiatrie, Politique, Objectivation
La « présentation de malade » : évolution d’une pratique, de ses enjeux et de ses effets de formation
The “presentation of the patient”: The evolution of a practice, its objectives, and its effects on training
Page :13-22
Nicolas Dissez
Résumé |
Objectifs |
À la faveur d’un retour sur l’histoire des présentations de malade et des évolutions de son dispositif, on tentera de situer sa fonction et ses enjeux en particulier concernant ses effets de formation. L’articulation de ces effets avec les nécessaires interrogations éthiques que soulève cette pratique sera soulignée.
Méthode |
La reprise de l’ensemble des écrits consacrés en France à la pratique des présentations de malade permet de constater sa permanence depuis les origines de la psychiatrie, ses enjeux multiples, les aléas qu’elle a pu rencontrer au cours de son histoire ainsi que les évolutions conséquentes qui en ont découlé. Une expérience personnelle de cet exercice au Centre Hospitalier Sainte-Anne pendant plus de vingt années permet d’en souligner les ressorts essentiels.
Résultats |
Pratiquée majoritairement au cours des dernières années par des psychanalystes, le dispositif des présentations de malades s’est trouvé considérablement subverti par la prise en compte des registres du langage, de la parole et du transfert. La dimension de contrôle ou de supervision devient également une fonction centrale de cette pratique. Cette subversion permet de faire avancer significativement les controverses qui en parcourent l’histoire. Elle en éclaire également les effets de formation qui, loin de se limiter à une fonction de démonstration pédagogique auprès des plus jeunes, impliquent chaque praticien à une place qui lui permet d’interroger sa position comme son acte, dans sa pratique quotidienne.
Discussion |
La diversité des dispositifs des présentations de malade, la variété des circonstances à l’origine de leur mise en place dans les services hospitaliers, la place variable qu’elles occupent dans l’organisation des soins et l’intérêt inégal qu’elle peut susciter de la part des équipes de soins justifient d’identifier les repères essentiels qui font la spécificité de cette pratique. L’articulation des trois places distinctes du patient, de l’examinateur et du public par le biais du savoir distinct attribué à chacune de ces places, permet de proposer une lecture du dispositif de ces présentations pour en examiner les effets de formation comme ceux de recherche clinique.
Conclusion |
Si la clinique est ce qui s’élabore et se transmet « au lit du malade » et dans le dialogue entre les praticiens, alors la présentation de malade se révèle un des lieux privilégiés de son exercice. Les questions éthiques qu’elle suscite constituent ainsi l’occasion d’un renouvellement de la clinique psychiatrique comme de sa pratique.
Mots clés : Présentation de malade, Ethique, Rencontre, Formation clinique, Supervision, Recherche
Les psychologues et leur formation
Psychologists and their training
Page :23-31
François Marty
Résumé |
Objectif |
Après avoir fait le point sur la formation actuelle des psychologues, cet article propose quelques pistes novatrices permettant d’envisager une évolution importante de la formation et des pratiques du psychologue.
Méthode |
Après avoir brièvement évoqué l’histoire de la psychologie et des courants qui la traversent, après avoir présenté succinctement l’état des lieux à l’étranger, puis fait part des perspectives de recherche actuelle sur l’évolution des formations, l’article se centre sur l’analyse de la formation actuelle des psychologues et de ses manques pour proposer un complément permettant d’envisager une formation des psychologues de haut niveau.
Résultats |
De cette recherche, il ressort que la formation actuelle des psychologues est trop théorique, ne tient pas assez compte de la diversité des situations du terrain ni des évolutions du métier.
Discussion |
La psychologie est traversée depuis l’origine par deux grands courants : la psychologie clinique et la psychologie expérimentale. Aujourd’hui, on assiste à un changement profond qui voit les neurosciences, héritières de la psychologie expérimentale, prendre le pas sur l’approche clinique et psychopathologique. Parallèlement, le métier de psychologue évolue.
Conclusion |
Il apparaît nécessaire de repenser la formation du psychologue en mettant l’accent sur la pratique et son analyse et sur les apports récents issus de la recherche tout en maintenant la pluralité des approches.
Actualités de la méthode de l’étude de cas. Proposition d’une méthodologie hypothético-processuelle et traductive pour les recherches référées à la psychanalyse
The Case-Study Method Today. Proposal of a hypothetico-processual and translational methodology for psychoanalytic research
Page :33-48
Manuella De Luca
Résumé |
Objectif |
La méthode du cas unique après une période d’expansion au-delà du champ de la médecine, en psychologie clinique, en psychanalyse, a fait l’objet de nombreuses critiques. Nous souhaitons montrer sa pertinence et sa spécificité dans la transmission et dans les recherches psychanalytiques.
Méthode |
Après un historique de l’utilisation de la méthode de l’étude de cas et la présentation des principales critiques et limites, nous mettrons en avant l’accès spécifique au savoir qu’elle propose notamment par la dérivation psychanalytique dans la recherche du concept de traduction.
Résultats |
La méthode du cas dans le cadre de la recherche mobilise la tension entre position de chercheur et position de clinicien. Elle souligne la persistance d’un écart entre théorie et pratique tout en ouvrant à une appréhension de l’hypercomplexité du fonctionnement psychique. Outre l’interprétation, elle utilise l’intuition, le devinement et la traduction comme méthode d’accès aux processus psychiques. Elle est un support indispensable à l’enseignement de la clinique notamment à l’université.
Discussion |
La méthode du cas est porteuse en clinique de particularités notamment quand elle se réfère à la psychanalyse. Elle vient illustrer ce que nous nommons les méthodes de recherches hypothético-processuelles et traductives. Ces méthodes sont dérivées de la psychanalyse comme procédé spécifique de recherche et de production de savoir. Comme l’étude de cas, ces méthodes de recherches sont des méthodes cliniques dans lesquelles l’observation est centrale, mais ne résume pas l’intégralité des procédés d’accès au fonctionnement psychique. Au-delà de l’interprétation déjà utilisée dans les méthodes hypothético-déductives, de l’intuition et du devinement dont l’usage est plus secondaire, la traduction dans un usage épistémologique qui ne se restreint pas à sa définition linguistique, en est un des axes essentiels. L’approche processuelle au cœur même de la recherche dans l’alternance traduction, détraduction, retraduction comme le maintien d’un écart théorico-pratique notamment dans la formulation des hypothèses et l’analyse des résultats complètent les grandes caractéristiques de ces méthodes de recherche hypothético-processuelles et traductives.
Conclusion |
La méthode du cas support d’enseignement de transmission est aussi une méthode de recherche qui si elle fait l’objet de critiques garde sa pertinence. Elle a toute sa place dans le champ plus vaste des méthodes hypothético-processuelle et traductive. Celles-ci sont dérivées de la psychanalyse, mais ouvrent à des échanges avec d’autres disciplines comme l’épistémologie des sciences et la sociologie pour promouvoir des modalités d’accès au savoir et de recherche autres que celles dérivées des sciences dites dures.
Forum
Faut-il enseigner la psychanalyse à l’Université ? Entretien avec Patrick Guyomard par Manuella de Luca et Thomas Lepoutre
On the Teaching of Psycho-Analysis in Universities: An Interview with Professor Patrick Guyomard
Page :49-66
Patrick Guyomard, Manuella De Luca, Thomas Lepoutre
Résumé |
Objectifs |
Le présent entretien entend reposer de front la question posée par Freud il y a un siècle : faut-il enseigner la psychanalyse à l’Université ? Et comment l’y enseigner ?
Méthodes |
Pour répondre à ces questions, le Professeur Patrick Guyomard a accepté de témoigner de son parcours, et au-delà, de retracer une histoire personnelle de la présence de la psychanalyse et des psychanalystes à l’Université, depuis la fondation, sous l’égide de Jacques Lacan, du département de psychanalyse à l’Université expérimentale de Vincennes.
Résultats |
Les rapports délibérément conflictuels de l’analyse et de l’université, traversant jusqu’à celles et ceux qui s’y consacrent, sont évoqués à la fois dans l’horizon historique de 1968, et dans l’horizon francophone actuel. Cela permet de convoquer une série d’interrogations majeures relatives à la transmission de la psychanalyse, à l’articulation du savoir théorique et de l’expérience clinique, et, en dernier ressort, d’interroger la responsabilité du psychanalyste dans ce champ.
Discussion |
Prenant en compte les modifications contemporaines du paysage universitaire et de la place qu’y tient la psychanalyse, Patrick Guyomard contextualise la présence, progressivement construite, de la psychanalyse dans les lieux universitaires et l’abri conjoncturel qu’elle a trouvé dans les départements de psychologie clinique. S’il soutient que la psychanalyse ne peut se maintenir à l’Université que dans une position critique, il rappelle également que la psychanalyse doit toujours être avertie des limites de son propre domaine.
Conclusion |
L’entretien dresse enfin le bilan des bénéfices, pour la psychanalyse comme pour l’Université, de cette présence conflictuelle : du côté de la psychanalyse, ouverture scientifique à d’autres interlocuteurs et d’autres disciplines ; du côté de l’Université, ouverture à « quelque chose » venant de la psychanalyse.
« La transformation, c’est l’inopiné de l’objet ». Une rencontre avec Vassilis Kapsambelis
“Transformation is in the unexpected encounter with the object”. A conversation with Vassilis Kapsambelis
Page :67-79
Vassilis Kapsambelis, Clément Fromentin, Nicolas Dissez, Thomas Lepoutre
Résumé |
Objectifs |
Cet entretien cherche à réfléchir sur les enjeux actuels de la formation des cliniciens dans un contexte marqué par des transformations importantes du champ de la psychiatrie. Vassilis Kapsambelis, qui occupe depuis de très nombreuses années des fonctions d’enseignement, à la fois sur les plans théorique, clinique et éditoriaux, et qui possède un double statut de psychiatre et de psychanalyste, transmet son expérience sous la forme d’une parole vive et authentique.
Méthode |
Animé par un dialogue avec trois interlocuteurs fondé sur un questionnement libre, Vassilis Kapsambelis est interrogé sur son propre parcours, débuté en Grèce à la fin des années 1970 et poursuivi en France. L’analyse du contexte social et politique de la psychiatrie de ses quarante dernières années est largement évoquée.
Résultats |
Ce récit permet d’évoquer les rencontres personnelles qui ont compté (collègues, maîtres et patients) tout autant que l’inspiration de l’engagement politique. Concernant la formation de la psychiatrie contemporaine, plusieurs périodes charnières sont abordées : la réforme de la psychiatrie dans l’immédiat après-guerre, la séparation de la neurologie et de la psychiatrie en 1968, la réforme de l’internat de spécialité en 1984.
Discussion |
L’histoire de la psychiatrie montre que son cours est loin d’être linéaire. Certaines périodes peuvent être qualifiées d’exceptionnelles en tant qu’elles produisent des bouleversements profonds de la discipline. Cela a été le cas dans les années qui ont suivi la seconde guerre mondiale mais ce n’est plus le cas de l’époque actuelle. C’est une période « normale » au sens où elle produit peu d’innovation au niveau du travail clinique. Il faut pouvoir s’en inspirer sans vivre dans une stérile nostalgie.
Conclusion |
Chaque formation est singulière et toute transformation subjective tient au caractère inopiné de l’objet. La formation clinique ne peut à elle seule éveiller un engagement et un intérêt qui souvent préexiste chez le clinicien, et qui peut être éclairé par son analyse.
La psychothérapie à l’université : ouvertures et perspectives. Entretien avec le Professeur Cyril Tarquinio
Psychotherapy at university: openings and perspectives. Interview with Professor Cyril Tarquinio
Page :81-89
Cyril Tarquinio, Yann Auxéméry
Résumé |
Objectifs |
La question de la formation aux pratiques psychothérapeutiques des praticiens psychologues et psychiatres apparaît globalement éludée par les facultés. Dans le cadre de la rentrée universitaire, le Professeur Cyril Tarquinio a lancé un appel aux enseignants-chercheurs afin de proposer des solutions pratiques pour développer l’enseignement des psychothérapies.
Méthodes |
L’article proposé est un entretien réalisé avec le Professeur Cyril Tarquinio en Septembre 2019 au Centre Pierre Janet, service autonome appartenant à l’Université de Lorraine (faculté de psychologie – site de Metz).
Résultats |
Dans la plupart des pays d’Europe, soit une différence est faite entre la formation des psychologues cliniciens et celle des psychothérapeutes, soit il est exigé de compléter sa formation académique de Master de psychologie par une formation complémentaire de plusieurs années (300 à 400heures). Aujourd’hui en France, avec le titre de psychologue clinicien, les étudiants en psychologie deviennent de fait des psychothérapeutes, tout comme les anciens internes de psychiatrie. En réalité, alors que le temps dévoué à l’enseignement des psychothérapies est très restreint à l’université, des générations de praticiens n’ont entendu parler que d’une seule approche (psychanalytique ou cognitivo-comportementale en général).
Discussion |
L’hypnose, l’Intégration du Cycle de la Vie, l’Eye Movement Desensitization and Reprocessing, les thérapies psychodynamiques, les approches psychocorporelles, etc., méritent qu’on s’y intéresse. Existe une littérature des plus convaincantes qui atteste de leur pertinence pour ne pas dire de leur efficacité/efficience. Mais ces modèles doivent être envisagés comme des hypothèses en dialogue permanent avec le terrain qui, sans cesse, transforme notre compréhension des idées et conduites de nos patients, ainsi que notre capacité à les prendre en charge. Si ces modèles sont in fine si nombreux, c’est sans doute parce qu’aucun d’entre eux n’est totalement satisfaisant en soi, et/ou qu’il y a une part de vérité en chacun d’eux. Le plus étonnant est qu’ils sont parfois décrits comme opposés les uns aux autres.
Conclusion |
Au-delà de résistances identiques depuis près d’un demi-siècle, il conviendrait aujourd’hui d’impulser une évolution de la profession de psychothérapeute en développant la formation aux pratiques psychothérapeutiques. Unique en France, service autonome de l’Université de Lorraine fonctionnant sur fonds propres, le Centre Pierre Janet apparaît comme un laboratoire précurseur d’un nouveau modèle de structure universitaire associant de manière cohérente la pratique clinique, l’enseignement aux psychothérapies et la recherche clinique. Alors que la création d’un doctorat spécifique d’exercice apparaît une solution intéressante, devront également être abordées en détail les questions fondamentales de la supervision et de la formation continue.
Entretien avec Catherine Chabert : méthode transmission et formation. Plaidoyer pour une approche théorico-clinique
Interview with Catherine Chabert: Transmission, method, and training. In defense of a theoretical-clinical approach
Page :91-99
Catherine Chabert, Manuella De Luca
Résumé |
Objectif |
À partir d’un entretien avec Catherine Chabert, psychanalyste, professeur émérite de psychologie clinique à l’université Paris Descartes, il s’agit d’explorer les enjeux mobilisés dans la transmission tant à l’université que dans le cadre des écoles de psychanalyse.
Méthode |
Entretien réalisé avec Catherine Chabert. Les questions portent sur la place de sa formation personnelle, puis sur la place de la méthode accompagnant l’enseignement, la recherche et la formation en psychologie et enfin, sur la place de la psychanalyse et de la métapsychologie dans la transmission.
Résultats |
Catherine Chabert insiste sur l’importance de la lecture des textes en profondeur telle qu’elle l’a apprise en philosophie et ensuite, avec les textes de Freud, comme outil de formation. Elle lie également la formation à l’exploration du fonctionnement psychique en psychologie clinique avec la méthode sur laquelle elle s’appuie comme la métapsychologie ou les tests projectifs selon l’approche de l’école de Paris.
Discussion |
C. Chabert a été formée à la recherche à la fois par D. Widlöcher et D. Anzieu dans sa thèse de psychologie puis dans son doctorat d’état. L’activité clinique est aussi indissociable dans la transmission et la formation dans des allers et retours entre pratique et théorie, ici la métapsychologie. Mais la psychanalyse a aussi une place importante dans la formation et la transmission pour, même si la psychanalyse n’a pas vocation à être enseignée à l’université, prendre en compte les effets transférentiels dans la formation et dans la volonté et le désir d’apprendre.
Conclusion |
Si la psychanalyse fait l’objet de nombreuses attaques actuellement, le combat pour la garder vivante et permettre qu’elle puisse enrichir l’enseignement de la psychologie clinique est à continuer.
Ouvertures
Processus transformationnels et champ analytique : un nouveau paradigme pour les modèles et les pratiques cliniques
Transformational processes and the analytical field: A new paradigm for models and clinical practices
Page :101-114
Thomas Rabeyron
Résumé |
Objectif |
Nous proposons dans ce travail une synthèse concernant les notions de transformation et de champ, ainsi que leur influence sur les pratiques et les modèles cliniques.
Méthode |
Après avoir rappelé l’usage de la notion de transformation faite par Wilfred Bion, nous décrivons le développement de cette notion au sein du mouvement post-bionien (en particulier les travaux de James Grotstein, Thomas Ogden, Antonio Ferro, Giuseppe Civitarese) ainsi que son association avec le concept de champ dont nous revenons sur les origines à partir des écrits de Madeleine et Willy Baranger.
Résultats |
Les notions de transformation et de champ s’avèrent particulièrement utiles pour penser la pratique. Elles favorisent notamment l’émergence d’un état de rêverie qui permet la transformation et l’intégration de vécus traumatiques à l’origine de différentes formes de souffrances psychiques.
Discussion |
Ces évolutions théoriques se traduisent également par une évolution des pratiques cliniques psychanalytiques au sein d’un paradigme qui met l’accent sur le rêve, les émotions, le contact avec O, le présent de la thérapie, la capacité négative, les vertex et la tolérance au doute afin de catalyser les processus de transformation psychique.
Conclusion |
Ces notions organisent un paradigme esthétique qui favorise l’émergence des processus de subjectivation. Cette approche souligne les limites du modèle du praticien scientifique dont les logiques manifestes et adaptatives prennent le risque d’entraver les potentialités les plus symboligènes du sujet. Il s’agit au contraire d’accompagner la créativité et l’originalité lors de chaque rencontre au sein d’une scène analytique conceptualisée comme un espace potentiel de rêve et de jeu.
Esquisse d’une théorie du soin en psychanalyse
Lines of approaches for a care/cure theory in psychoanalysis
Page :115-132
Guénaël Visentini
Résumé |
Objectifs |
La « santé mentale » est aujourd’hui un enjeu crucial pour les sociétés. Mais le statut clinique des troubles visés fait débat, complexifiant l’appréciation des thérapies à recommander. Cet article prend part aux controverses actuelles. Son objectif est de dégager les opérateurs conceptuels d’une théorie psychanalytique du soin, et de les situer par rapport à ceux d’autres approches – centrées sur le cerveau, les symptômes, ou le vécu des personnes.
Méthode |
Dans une perspective épistémologique attentive aux pratiques cliniques et à partir d’une relecture des comptes rendus de cas de l’œuvre complète de Freud (1886–1939), il est proposé une extraction des « schèmes opérateurs » de la psychanalyse freudienne, entendue comme forme renouvelée de psychothérapie.
Résultats |
Ces « schèmes opérateurs » peuvent être distribués en deux groupes, correspondant aux deux faces de la pratique freudienne : les schèmes du « prendre soin » (care) et ceux des « actes de soin » (cure). Les premiers rendent possible une attention clinique à l’universalité, à la typicité et à l’unicité de chaque patient. Les seconds, permettant un repérage du déclenchement et de la genèse des troubles, servent de points d’appui dynamiques pour conditionner des améliorations, voire des rétablissements au sens psychique.
Discussion |
L’extraction d’une telle théorie du soin chez Freud permet de relancer le débat sur les prises en charge. À focaliser sur le cerveau ou les seuls symptômes, le clinicien ne néglige-t-il pas la contextualité historique, sociale et surtout psychique (liée à l’histoire de vie propre) des troubles dits « mentaux » ? Et à focaliser sur les vécus individuels immédiats, le clinicien ne néglige-t-il pas l’insu psychique tout autant que la typicité des souffrances adressées – dé-qualifiant ainsi son écoute, pourtant au fondement de sa pratique du soin ?
Conclusions |
Face à ces deux écueils, la psychanalyse freudienne permet une approche holistique et intégrative. Se centrant sur la dimension psychodynamique, elle propose des traitements sur mesure, pragmatiques, inventifs, surprenants – dont l’efficience est aujourd’hui mesurable et mesurée. C’est peut-être pourquoi, même si ses concepts relèvent des sciences humaines (et non expérimentales), la psychanalyse reste un référentiel attractif pour les cliniciens en formation et pour une grande partie des praticiens les plus expérimentés.
Revue de la littérature
L’intérêt du test de Rorschach dans l’évaluation diagnostique des troubles du spectre autistique
The relevance of the Rorschach test to the diagnostic evaluation of autism spectrum disorders
Page :133-154
Antoine Frigaux, Renaud Evrard, Joëlle Lighezzolo-Alnot
Résumé |
Objectifs |
Les procédures et outils diagnostiques standardisés et récemment recommandés par les autorités de santé pour l’évaluation des troubles du spectre autistique peuvent présenter leurs limites, notamment dans les cas complexes soulevant la question du diagnostic différentiel, ce qui conduit les praticiens à se tourner vers d’autres outils dont peut faire partie le test de Rorschach. Nous voulons présenter le test de Rorschach comme constituant un outil porteur d’une approche clinique diagnostique différente et ampliative des modalités diagnostiques déjà pratiquées pour les enfants et les adultes notamment dans ces situations diagnostiques complexes.
Méthode |
Un argumentaire présentant les intérêts et les limites du test de Rorschach dans la clinique diagnostique des troubles du spectre autistique fait suite à un état des lieux de la pratique du test dans les procédures d’évaluation des troubles du spectre autistique en clinique infantile et adulte, et sera soutenu par une synthèse des études internationales princeps et actuelles soulignant le potentiel différentiel de l’outil.
Résultats |
Une lecture des résultats des études internationales permet d’avancer que le test de Rorschach peut constituer un révélateur particulièrement efficace, à la fois de caractéristiques sémiologiques autistiques recherchées dans le cadre du diagnostic psychiatrique, mais plus encore, qu’il permet aussi de configurer une situation clinique dans laquelle le clinicien pourra porter une attention toute particulière au déploiement des processus cognitif et affectif intrapsychiques et leurs perturbations dans une perspective dynamique et tout au long de la vie des sujets autistes. Ces indices qualitatifs et quantitatifs recueillis au test pourront être intégrés aux autres données cliniques pour restituer quelque chose de la vie psychique du sujet dans sa singularité mais aussi servir le diagnostic différentiel, notamment d’avec la schizophrénie.
Discussion |
Le test de Rorschach parait présenter un potentiel diagnostique encourageant qui reste à confirmer en mettant en dialogue les résultats issus des différentes études aux épistémologies différentes, qu’il faudra ensuite vérifier avec des méthodologies comprenant des cohortes de sujets plus importantes.
Conclusions |
Le test de Rorschach paraît être un outil prometteur ouvrant à une approche diagnostique des TSA différente et susceptible d’apporter un regard original et complémentaire nourrissant les pratiques cliniques et la recherche fondamentale.
À propos de…
H. Ellenberger et le rêve du savoir. À propos de… « Ethno-psychiatrie. Édition critique d’Emmanuel Delille » d’Henri Ellenberger
Page :157-162
Clément Fromentin
Psychanalyse et psychoses. À propos de… « Histoire du traitement des psychoses par la psychanalyse » de David Monnier
Page :163-166
Jean Garrabé